Vers un monde de carottes plus que de bâtons

Vous ne vous en doutez probablement pas, mais l’une des choses les plus difficiles de cette infolettre, c’est d’en trouver la première phrase. Des fois ça me prend dix minutes. C’est pourquoi aujourd’hui j’ai décidé d’utiliser la première phrase pour vous dire que j’étais incapable de trouver une première phrase. Une bonne chose de réglée.

Les abonnés hypermax-premium apprendront à la fin de cette chronique qu’un député du Bloc m’a écrit pour me donner de la marde (mais gentiment). Ça parle aussi un peu de Rémi Villemure.

L'infolettre hebdomadaire d'Olivier Niquet

Un observatoire de la bêtise

S'abonner

Email sent! Check your inbox to complete your signup.

Aucun représentant n'ira chez vous.

Le punitivisme

Je suis tombé cette semaine sur une vidéo de France Inter sur TikTok où il était question de punitivisme. Je sais que ça fait deux semaines de suite que je vous parle de vidéos TikTok d’émissions françaises, mais bon, c’est bien la preuve qu’il n’y a pas que de la bouette sur TikTok, même si je n’arrête pas de tomber sur des vidéos de monsieurs qui font du patin à roulettes (faut dire que c’est hypnotique). Bien hâte d’ailleurs qu’on nous offre un TikTok alternatif à la Mastodon ou Bluesky.

Je disais donc, une vidéo sur le punitivisme, un mot qu’Antidote ne connait pas. Le philosophe Geoffroy de Lagasnerie y explique que le punitivisme, cette « approche de la justice et du maintien de l’ordre basée sur la sévérité des sanctions, la répression et l’augmentation des peines, plutôt que sur la prévention, la réhabilitation ou la réinsertion sociale » (selon Chat GPT), ne fonctionne pas. Aux États-Unis, 1 prisonnier sur 10 a une peine à perpétuité alors que c’est 1 pour 1000 en France, mais il y a quand même six fois plus d’homicides aux États-Unis qu’en France. Des peines plus sévères ne dissuadent pas les gens de s’entretuer. La cause est ailleurs. Peut-être cette passion pour tirer du gun? Je lance ça comme ça.

Dans le même genre, on nous disait cette semaine dans Le Devoir que la peine de mort regagnait du terrain aux États-Unis avec Trump, même si c’était plus coûteux que l’emprisonnement à vie. Selon l’organisme Equal Justice Initiative, la peine de mort « détourne l’attention des politiques efficaces de sécurité publique et fausse les élections des juges et des procureurs en privilégiant la rhétorique et les candidats “durs envers la criminalité” ». Bref, en plus de ne pas fonctionner, la répression sert comme une diversion.

De Lagagasnerie dit:

« Donc de façon contre-intuitive, il n'y a pas nécessairement de relation entre intensité de la répression et diminution de la violence. Le punitivisme est un simplisme qui fonctionne à travers un certain nombre d'équations triviales qui sont intuitivement pertinentes, mais qui sont factuellement fausses. »

Intuitivement pertinente, mais factuellement fausses.

Quand j’entends nos politiciens (certains plus souvent que d’autres) nous dire qu’il faut agir avec le gros bon sens, ça me met en siffleux. D’abord, parce que nos intuitions nous jouent souvent des tours. Daniel Kahneman l’a bien expliqué dans Système 1, système 2. Nous avons deux modes de raisonnement. Le système 1, qui fonctionne de manière automatique, involontaire, intuitive et sans effort. C’est notre système de raisonnement par défaut. Le système 2 intervient dans la résolution de problèmes complexes et il intervient généralement quand le système 1 est confronté à un problème nouveau. Le système 1 est ben pratique, il contrôle une grande partie de ce qu’on fait, mais c’est lui qui génère tous les biais cognitifs. Il est conçu pour tirer des conclusions hâtives à partir de très peu d'informations - et il n'est pas conçu pour comprendre à quel point ces conclusions sont justement hâtives. Ces politiciens font appel à notre système 1 et en ne mettant pas en perspective les menaces les plus grandes.

Ça me fâche quand je vois des choses claires comme ça, qui montrent que nos façons de fonctionner ne marchent pas, comme dans le cas du punitivisme, mais que l’on continue de le faire parce que c’est comme ça, et que ça semble logique. Je dis pas qu’il faut abolir les prisons. Mais investir dans la prévention plutôt que dans la répression pourrait être plus efficace.

Je reviens à Lagasnerie qui parle de Durkheim:

« Ce que dit Durkheim, déjà dès la fin du XIXe siècle, c'est qu'il y a un principe de négativité de l'action de l'État qui est à l'œuvre dans le principe de répression, c'est-à-dire que l'État passe son temps à penser que agir, c'est agir négativement, c'est infliger de la souffrance, c'est formuler des peines, c'est formuler des amendes, etc., et que donc c'est par la négativité qu'on agit sur les comportements. Et Durkheim, dès le XIXe siècle, disait « c'est bizarre qu'on ne pense pas à l'État comme un principe positif, qu'est-ce que ça voudrait dire un État qui fonctionnerait selon un principe d'assistance, d'aide, de récompense, d'encouragement, et peut-être que c'est beaucoup plus par ces mesures contre-intuitives, ce que les psychologues appellent non complémentaires, qu'on pourrait beaucoup plus désamorcer les pulsions agressives à l'œuvre dans la société ».

Cette idée d’utiliser le renforcement positif, la carotte plutôt que le bâton, ça devrait guider nos politiques dans plusieurs domaines. Récompenser les bons comportements plutôt que de punir les mauvais comportements. Si on était plus positif en général, peut-être que ça aurait aussi un impact sur l’atmosphère.

Ça me fait penser que depuis un mois, j’ai le système Hilo d’Hydro-Québec, qui donne des rabais lorsque l’on réduit la consommation d’électricité. Ça fonctionne bien chez nous. Ma conjointe de fait a commencé à gérer nos thermostats de façon plus rigoureuse et on se ramasse avec des 2$ ou 3$ par jour de moins à payer. Y’a des matins que j’ai frette en ta par contre. Disons que c’est pas chaud pour la pompe à eau quand je me lève à 5h pour enregistrer mon balado. Mais qu’est-ce qu’on ne ferait pas pour deux piasses? Bizarre que ce ne soit pas plus populaire.

Je ne pense pas que de slaquer sur les punitions soit très très en vogue chez les politiciens qu’on a, ici et ailleurs, en ce moment, malheureusement…

Plogues

• 🎥 OLI 24/7 - La maternelle de l'Assemblée nationale
• 🎥 OLI 24/7 - Steven Blaney candidat à la mairie de Lévis: let's go les pogos!
• 🎥 OLI 24/7 - Mark Carney explique ce qu'il aime de la culture québécoise (genre)
• 🎥 OLI 24/7 - Les nids de poule du Saint-Laurent, le bagarres au hockey, le 3e lien et les licornes
• 🎥 OLI 24/7 - Réactions à l'annonce du TGV Québec-Toronto

Poilievre

J’ai toujours été réticent à comparer Pierre Poilievre à Donald Trump. Il lui manque le côté outrageant, la tendance à la calomnie et… la folie. Le côté agresseur sexuel aussi. Quand Paul Arcand lui avait demandé l’an passé ce qui le distinguait de Trump, il avait répondu qu’il était différent parce qu’il était contre les déficits, contrairement au président américain. Il avait aussi dit à TVA que Trump ne représentait « pas vraiment » le gros bon sens. Bref, il s’en dissocie, mais c’est mince.

Il faut dire que plusieurs des fans de Poilievre sont aussi des fans de Trump. Selon un sondage, 45% des électeurs conservateurs auraient voté pour Trump s’ils avaient été citoyens américains. Seulement 21% des Canadiens toutes allégeances confondues iraient toutefois dans ce sens. M. Poilievre est un peu fourré avec ça. Dernièrement, j’ai eu l’impression qu’il avait une petite tendance a calquer les idées de Trump:

• Il veut couper l’aide étrangère pour financer une base militaire dans le Nord, un peu comme Trump qui a coupé dans USAID.
• Il veut laisser des influenceurs participer aux points de presse dans l’enceinte parlementaire, comme Trump le fait en expulsant des médias de la Maison-Blanche.
• Il met de l’avant son slogan « Canada d’abord », comme le « America First » de Trump.

Sur ce dernier point, ça m’a fait un peu rire de voir Maxime Bernier dire qu’il allait aussi miser sur ce slogan inspiré de Trump, alors que Poilievre ne veut pas s’associer à cette même source d’inspiration.

En passant, je n’avais pas réalisé que Jocelyn Coulon avait maintenant un balado avec le prof du Kazhakstan Jean-François Caron. Ce même très rigoureux chroniqueur qui trafique des informations à mon sujet. Je me demande par où est passé M. Coulon pour se ramasser là…

Tout ça pour dire que Poilievre semble s’inspirer un peu de Trump. Heureusement qu’il ne veut pas faire de déficits…

Qlub

Il a été question dernièrement dans les médias d’un « nouveau réseau social québécois » intitulé Qlub. Le chroniqueur Frédéric Labelle du 98,5 en a parlé, ainsi qu’Alain McKenna dans La Presse, rapidement. Ça m’a surpris un peu de voir que c’était devenu une nouvelle jusqu’à ce que Jean-Sébastien Girard nous demande si on était sur Qlub et nous dise qu’il s’était créé un compte. JS n’est pas vraiment un gars qui est bon avec « les ordines » habituellement.

Mais Qlub n’est pas un « réseau social québécois », c’est une instance de Mastodon. C’est un serveur connecté au Fediverse. Donc si vous vous inscrivez sur Qlub, vous vous inscrivez sur Mastodon comme moi je suis inscrit sur Mastodon par l’entremise d’un serveur québécois (jasette.facil). C’est juste un branding différent. Ça me surprendrait que ça lève, comme Mastodon ne lève pas tellement non plus, à cause que c’est juste un petit peu plus compliqué que les autres réseaux sociaux à comprendre, contrairement à Bluesky par exemple.

Cela dit, la perspective de mélanger les réseaux sociaux qui utilisent des protocoles ouverts comme ces deux plateformes est intéressante. D’ailleurs, l’application Tapestry permet de faire cela. C’est pas au point, mais j’aime ça.

Derrière les brouteurs

Fascinante incursion chez les arnaqueurs africains:

« Alvin est un ancien brouteur : c’est le nom qu’on donne à ceux qui escroquent des étrangers sur Internet pour des centaines, voire des milliers de dollars, souvent grâce à des tactiques de fraude amoureuse »

La rédemption d’un brouteur africain

Récit en 7 temps d’un arnaqueur qui rêve d’un avenir meilleur.

LogoMarie-Ève Martel

Musique

Catherine Leduc (c’est la fille de Tricot Machine) a sorti une chanson:

⚑ PREMIUM: Denis Trudel m’a écrit